Fukushima cinq ans après, retour à l’anormale

Etude pour Greenpeace Belgique

Rapport complet

Résumé

La catastrophe nucléaire à la centrale de Fukushima daï-ichi (FDI), classée au niveau 7 de l’échelle internationale INES – le niveau le plus élevé – est largement reconnue comme étant d’origine humaine. Elle a contaminé un grand territoire au Japon et est responsable du déplacement de 160 000 personnes environ, selon les statistiques officielles. Les territoires contaminés qui n’ont pas été évacués sont aussi fortement affectés.

Les rejets radioactifs de la centrale accidentée perdurent, parfois à des niveaux anormalement élevés. Cela a été caché pendant plusieurs mois, générant ainsi une forte confusion. De mauvaises pratiques ont ainsi conduit à des rejets importants de poussières radioactives et à une contamination significative à des dizaines de kilomètres de la centrale. TEPCo peine à réduire les fuites en mer et l’eau contaminée continue à s’accumuler dans des cuves sans solution en vue.

La compagnie en est toujours à tenter de stabiliser la centrale et de réduire les menaces. Le démantèlement à proprement parler n’a pas encore commencé. Alors que les territoires qui entourent la centrale ont été évacués, il y a une crainte de reprise des rejets massifs en cas de nouvelle catastrophe naturelle. Les personnes déplacées se demandent s’il est raisonnable de rentrer une fois l’ordre d’évacuation levé. En effet, les réacteurs accidentés de la centrale de FDI sont plus fragiles que des réacteurs normaux et leur enceinte de confinement fuit. Ils pourraient ne pas tenir en cas de séisme et tsunami, entraînant ainsi de nouveaux rejets radioactifs massifs.

Les évacués

De nombreuses personnes ont dû évacuer pendant la phase d’urgence, suivies par d’autres durant les premiers mois à cause de la contamination radioactive. De nombreuses autres personnes sont parties d’elles-mêmes pour se protéger ou protéger les enfants. Cinq ans plus tard, la plupart restent évacuées et ont du mal à imaginer leur avenir.

Le nombre total de personnes déplacées n’est pas bien connu. Cependant, selon les données officielles, environ 160 000 personnes ont fui les territoires contaminés. Cinq ans plus tard, le nombre de personnes déplacées est toujours de 100 000 environ alors que l’ordre d’évacuer n’a été levé que dans trois communes. Celles qui se sont réinstallées ailleurs ne sont plus comptées bien qu’elles souffrent encore.

Au-delà de ces chiffres, il y a de nombreux individus dont la vie a été fortement perturbée. Les catastrophes nucléaires majeures sont d’abord des catastrophes humaines qui conduisent au déplacement de nombreuses personnes qui perdent tout : le logement, la vie de famille, le lien social, jusqu’à leur avenir. L’évacuation génère de grandes difficultés et de la souffrance pour les populations affectées, mais elle était nécessaire. Les personnes qui n’ont pas été évacuées et qui vivent toujours en territoire contaminé s’inquiètent aussi beaucoup pour leur santé ; leur vie quotidienne est aussi fortement perturbée.

Pour définir le devenir des territoires évacués, les autorités japonaises les ont divisé en trois zones en fonction du débit de dose ambiant : les zones où l’exposition externe annuelle devrait dépasser vingt millisieverts (20 mSv) pendant cinq ans et là où elle dépasse 50 mSv actuellement sont classées en « zones de retour difficile ». L’ordre d’évacuation ne sera pas levé avant plusieurs années et la réinstallation des résidents est aidée. Les zones où l’exposition externe sera sûrement inférieure à 20 mSv par an sont classées en zones où l’ordre d’évacuer est prêt à être levé. Entre les deux, là où l’exposition externe est comprise entre 20 et 50 mSv par an, les résidents ne peuvent pas rentrer, mais la décontamination devrait pouvoir la faire passer sous la limite de 20 mSv par an.

La protection contre les radiations

Aussi bien la politique d’évacuation que celle de retour des populations est basée sur une interprétation laxiste des recommandations internationales de radioprotection qui ne sont pas très contraignantes. 20 mSv par an correspond à la valeur la plus haute des niveaux de référence introduits par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) pour ce qu’elle appelle les « situations existantes » qui incluent le post-accident. La CIPR recommande de baisser ce niveau à 1 mSv par an. Les autorités japonaises ont donc adopté cette valeur comme un objectif à long terme, sans calendrier d’application. Pour le moment, elles maintiennent un niveau de référence de 20 mSv par an qui est trop élevé pour nombre de Japonais.

En ce qui concerne la contamination de l’alimentation, la stratégie est complètement différente : les niveaux de contamination maximaux admissibles ont été fixés en dessous des recommandations internationales pour retrouver la confiance des consommateurs et soutenir l’agriculture dans les territoires contaminés.

Le contraste entre la protection contre l’exposition externe liée au rayonnement ambiant et l’exposition interne liée à l’alimentation est saisissant. Dans le premier cas, les autorités refusent de baisser les niveaux de référence qui sont au plus haut des recommandations internationales et dans l’autre, les niveaux maximum admissibles sont divisés par un facteur 5 après un an.

Une telle différence montre que le souci premier des autorités concerne les conséquences économiques de la catastrophe nucléaire. La diminution des niveaux dans l’alimentation avait pour but de rassurer les consommateurs qui évitent les produits de Fukushima. Inversement, l’indemnisation des personnes évacuées représente un lourd fardeau économique et les autorités n’envisagent rien d’autre que le retour des populations déplacées.

Afin d’obtenir l’assentiment des citoyens, les autorités répètent à l’envi que des cancers radio-induits n’apparaissent pas, ou s’ils apparaissent ils sont indétectables, en dessous d’une dose cumulée de 100 mSv, bien que les recommandations internationales soient basées sur l’hypothèse que le nombre de cancers et les effets héréditaires sont proportionnels à la dose reçue, sans seuil. Avec une limite à 20 mSv par an, 100 mSv cumulés peuvent être rapidement atteints.

Ainsi, les autorités japonaises ont changé leur politique et ont introduit une nouvelle façon de mesurer la dose. Les zones d’évacuation ont été définies à partir du débit de dose ambiant qui peut être mesuré simplement à l’aide de différents appareils, dont de simples radiamètres. Puis, pour estimer la dose annuelle, il est supposé que chaque individu passe en moyenne 8 heures par jour à l’extérieur et qu’à l’intérieur, l’exposition est réduite de 60%. Mais, pour le retour des populations, les autorités vont fournir des dosimètres individuels, appelés glass-badges au Japon, pour enregistrer les doses reçues par chacun, sans mentionner que ce type d’appareil donne une valeur globale 30 à 40% inférieure à l’autre méthode de mesure avec des radiamètres.

Cette nouvelle politique repose aussi sur un changement de paradigme : chacun devient responsable de sa propre protection contre les rayonnements ionisants. A l’inverse des travailleurs du nucléaire qui doivent être contrôlés, personne ne va vérifier que la population utilise bien ce dosimètre individuel. C’est particulièrement problématique pour les enfants qui sont plus sensibles aux radiations. Contrôler sa vie au quotidien, apprendre à minimiser la dose reçue, constituent des fardeaux qui ne sont pas acceptés, surtout quand il y a des enfants car ce n’est pas un avenir à leur proposer.

Trente ans après la catastrophe de Tchernobyl, les règles de radioprotection définies au niveau international ne sont pas adaptées aux personnes qui vivent dans les territoires contaminés. Elles sont particulièrement confuses pour les populations et difficiles à mettre en œuvre. Cela permet aux autorités de les adapter à leur propre avantage plutôt qu’à celui des population concernées. Les règles devraient être plus contraignantes en terme de limites, d’évolution temporelle et de mise en œuvre opérationnelle.

Contamination de l’alimentation

En ce qui concerne la contamination de l’alimentation, les autorités japonaises ont d’abord sous-estimé l’ampleur des problèmes et ont été fréquemment prises par surprise dans les premiers mois. Par conséquent, la confiance envers les autorités et le gouvernement s’est érodée et les populations préoccupées par la sécurité alimentaire ont reconsidéré leur relation à l’Etat et à l’alimentation.

Mais les citoyens japonais, les producteurs, les vendeurs et les consommateurs ont mesuré la radioactivité dans les aliments, forçant ainsi les autorités à introduire des contrôles systématiques. La situation s’est donc rapidement améliorée et, à l’exception des plantes sauvages, du gibier, des poissons et des potagers, la contamination de l’alimentation vendue sur les marchés reste faible. La contamination interne des enfants contrôlés par anthropogammamétrie est suffisamment faible pour considérer que l’exposition externe est le problème principal dans les territoires contaminés. Ce succès a un coût : de nombreux agriculteurs ne peuvent pas reprendre leurs activités et certaines productions traditionnelles pourraient disparaître.

Le cas japonais montre l’intérêt d’un processus ouvert dans lequel chacun peut contrôler la contamination et adapter son régime alimentaire à ses propres critères. Cependant, les consommateurs rechignent toujours à acheter des aliments en provenance des territoires contaminés. Les producteurs et les agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, forestiers… en particulier souffrent encore cinq ans plus tard.

La politique gouvernementale s’est focalisée sur la sécurité alimentaire (anzen en japonais), sans se préoccuper de la dimension culturelle et du climat de confiance vis à vis des aliments (anshin, en japonais). Imposer des standards ne suffit pas à surmonter la défiance des consommateurs et le défi est de garantir la sécurité alimentaire et la tranquillité qui va avec.

Quel avenir pour les territoires évacués ?

Le gouvernement japonais a décidé de lever tous les ordres d’évacuation avant mars 2017 et d’arrêter les indemnisations avant mars 2018, sauf dans les zones dites de retour difficile. Même J-Village, un ancien centre d’entraînement de football transformé en base pour les travailleurs à la centrale de FDI, va être rendu aux sports avant les jeux olympiques de 2020.

Les autorités japonaises rêvent d’une catastrophe réversible et les recommandations internationales sur la gestion post-accidentelle se préoccupent surtout de retour à la normale. Avec une demi-vie de 30 ans, le césium-137 décroît trop lentement. Le gouvernement japonais a donc lancé un vaste chantier de décontamination aussi bien dans les territoires évacués que dans ceux qui n’ont pas été évacués, partout où l’exposition externe pourrait dépasser 1 mSv par an, à l’exception, une fois encore, des zones de retour difficile. Cela consiste à gratter la terre, couper les herbes, émonder les arbres et les buissons et laver les toits des habitations, les routes, trottoirs… dans les environs immédiats des zones de vie, transformant ainsi les villes et villages en oasis au milieu d’un vaste territoire contaminé. Pour les zones évacuées, les plans prévoient la décontamination de 24 800 ha et rien n’est prévu au-delà, dans les forêts et montagnes qui couvrent 70% de la province de Fukushima.

La décontamination n’est pas très efficace et engendre une grande quantité de déchets radioactifs pour lesquels les solutions envisagées sont des échecs à cause de l’opposition des populations. De fait, la gestion des déchets radioactifs est très complexe dans tous les pays qui en ont accumulé une quantité significative. Mais après un accident grave, c’est encore plus complexe et les volumes sont gigantesques. Dans la seule province de Fukushima, environ 20 millions de mètres cubes sont attendus et le centre d’entreposage prévu va couvrir une superficie de 16 km2. Pour le moment, les projets de stockage sont bloqués à Fukushima et dans les autres provinces, mais les autorités s’accrochent à leur approche autoritaire qui est un échec : Décider, Annoncer et Défendre (DAD). Pendant ce temps là, les déchets s’accumulent dans des sacs qui se détériorent rapidement.

La décontamination s’est révélée être très décevante alors que le niveau de dose ambiant n’a pas baissé de façon significative par rapport à ce que l’on a pu observer dans les forêts où aucun travaux n’ont eu lieu. Mais les autorités continuent à favoriser le retour des populations.

Les résidents sont réticents à rentrer

Jusqu’à présent, les ordres d’évacuation ont été levés dans des parties de Tamura et de Kawauchi en 2014, et à Naraha en 2015. Tous ces territoires sont dans les parties les moins contaminées de la zone d’évacuation de 20 km. Les recommandations à l’évacuation autour de nombreux points chauds répartis çà et là ont toutes été levées. Mais les habitants rechignent à rentrer et les territoires contaminés font face aux problèmes de dépopulation et de vieillissement.

La commune de Hirono, par exemple, qui est entre 20 et 30 km de la centrale de FDI a été incluse dans la zone dite de préparation à l’évacuation d’urgence en 2011. Les habitants peuvent rentrer, mais selon le dernier recensement de 2015, une grande partie des résidents est engagée dans les travaux à la centrale accidentée : la population masculine a augmenté de 2,3% depuis 2010 et la population féminine, au contraire, a baissé de 42,3%. A Minami-Soma, la population a baissé de 66% depuis l’accident et l’âge moyen des habitants a augmenté de 14 années, un niveau attendu pour 2025.

Un retour à la normale est impossible après un accident nucléaire de grande ampleur comme ceux de Tchernobyl et de Fukushima. Les principes directeurs des Nations Unies relatifs aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays enjoignent les autorités à associer pleinement ces personnes à la planification et à la gestion de leur retour et de leur réinstallation. Mais au Japon, cette participation est réduite à des « réunions d’explication » (seitsumeikai) à huis clos, sans la présence de médias, d’associations, ou d’experts, laissant ainsi les populations désarmées.

Les communautés ne voient pas la fin des difficultés auxquelles elles font face et en souffrent. Rester ou partir, rentrer ou se réinstaller sont autant de choix difficiles sans solution satisfaisante. Le nombre de personnes souffrant de troubles psychologiques, comme le stress post-traumatique ou la dépression, est plus élevé que la normale, aussi bien chez les personnes évacuées que chez les personnes non-évacuées. Le nombre de suicides liés à la triple catastrophe est plus élevé à Fukushima que dans les provinces de Miyagi et d’Iwate, sévèrement touchées par le tsunami.

Conclusions

Les conséquences de l’accident nucléaire sont toujours présentes et des réponses acceptables pour les populations sont indispensables. Les personnes affectées sont toujours en train de se battre pour s’en remettre. Elles continuent à faire face à de fortes inquiétudes relatives à leur santé, à la séparation de leur famille, aux ruptures dans leur vie et à la contamination de l’environnement sur de vastes territoires. Et comme une catastrophe nucléaire dure pendant des décennies, les populations ne voient pas la fin des difficultés auxquelles elles font face.

Après un tel accident, de nombreuses personnes ne croient plus en la parole des autorités et des experts qui n’ont pas réussi à les protéger. Mais les chemins vers la résilience requièrent une bonne coordination entre les autorités et les populations. Les solutions envisagées et expérimentées ne peuvent pas ignorer les besoins et demandes spécifiques des personnes concernées, ainsi que leurs suggestions. Cela implique de trouver aussi de nouvelle méthode de délibération et de prise de décision. Les solutions peuvent différer d’une famille à l’autre ou d’une communauté à l’autre. Comme il n’y a pas de bonne solution, chaque décision doit être évaluée et adaptée. En plus de la souffrance engendrée, un accident nucléaire remet en cause les fondements de la démocratie.

Les citoyens japonais ont fait montre d’initiative à propos de la mesure de la radioactivité. Une cartographie de la pollution radioactive a été effectuée partout et la surveillance des aliments a poussé les autorités, producteurs et vendeurs à renforcer leurs propres contrôles pour finalement conduire à une baisse significative de l’ingestion de radioéléments. Pourquoi un tel processus ouvert qui a fait ses preuves ne peut pas être mis en place pour décider de l’avenir des territoires contaminés et de leurs populations ?

Fukushima five years later: back to normal?

Analysis commissioned by Greenpeace Belgium

Full report

Summary

The nuclear disaster at the Fukushima daiichi nuclear power plant (FDNPP), ranked at Level 7 of the International Nuclear Event Scale (INES), which is the highest level, is widely recognized as man-made. It contaminated a vast territory in Japan and was responsible of the displacement of about 160 000 persons according to official statistics. Contaminated territories that were not evacuated are also strongly affected by the disaster.

The crippled reactors are still discharging radioelements into the environment. Anomalous discharges were hidden for several months, generating to a lot of confusion. Sloppy behaviours led to significant contamination by radioactive dust tens of kilometres away from the plant. TEPCo has difficulties to curb down the radioactive leaks into the ocean and tainted water piles up in tanks without any solution in sight.

TEPCo has yet to fully stabilize the power station and its priority is still to reduce the threat. Dismantling has not started yet. While communities around the station were evacuated due to the long-going contamination, and many fear radioactive emissions could resume in the event of another natural disaster. They wonder if it is safe to come back when the evacuation order is lifted. Actually, the crippled reactors at FDNPP are more fragile than usual reactors, and their containment vessels are leaking. They might not be able to sustain an earthquake or a tsunami, which would lead to a new massive release of radioelements.

Evacuees

Many people were forced to evacuate during emergency phase followed by others during the first months of the disaster due to the radioactive contamination. Many others evacuated on their own in order to protect their children or themselves. Five years later most of them remain evacuated and hardly imagine their future.

The total number of evacuees related to the nuclear disaster is not well known. Nevertheless, about 160 000 people fled from contaminated territories according to official statistics. Five years later, the number of nuclear displaced persons is still about 100 000 as evacuation orders have only been lifted in three places. Evacuees who resettled are not counted anymore although they might be still suffering.

Behind these figures, there are individuals whose life was disrupted. Major nuclear disasters are firstly human disasters leading to the displacement of many people who lose everything from dwellings, family life, social relationship and future. Displacement generates conditions of severe hardship and suffering for the affected populations, but it could be avoided. Non-evacuated people in contaminated territories worry for their health and future and their daily life is also severely affected.

To decide about the fate of evacuees, Japanese authorities have divided the evacuated territories into three zones depending on the airborne dose rate: Areas where the annual integral dose of radiation is expected to be 20 mSv or more within five years and the current integral dose of radiation per year is 50 mSv or more are classified as difficult-to-return zones. Evacuation orders will not be lifted before several years and residents’ relocation is supported. Areas where it is confirmed that the annual integral dose of radiation will definitely be 20 mSv or less are classified as areas to which evacuation order is ready to be lifted. In between, with an annual external dose ranging from 20 to 50 mSv, the residents are not permitted to live, but decontamination is expected to reduce the annual dose below 20 mSv.

Radiation protection

Both evacuation and return policies are based on a lax interpretation of the international recommendations that not very binding. 20 mSv per year corresponds to the highest value of the International Commission on Radiological Protection (ICRP) reference interval in case of existing situation that includes post-accident. ICRP recommends lowering with time the reference level to 1 mSv per year. Consequently, Japanese authorities have adopted this value as a long-term target, without a precise agenda for compliance. At the moment authorities stick to the 20 mSv reference level that is considered as too high by many Japanese.

Regarding the food contamination, the strategy was completely different: maximum allowed concentrations were fixed below international standards to promote the recovery of consumers’ confidence and food production in contaminated territories.

Contrast between the protection against external exposure and internal exposure through food intake is shocking. In the first case Japanese authorities refuse to lower the reference levels that are kept at the highest value of the international recommendations whereas in the second case maximum allowed values were divided by a factor 5 after a year.

Such a contrast shows that the primary concern of Japanese government is the economical consequences of the nuclear disaster. Contamination limits in food were lowered to regain the confidence of consumers who avoid products from Fukushima. On the contrary compensation of the evacuated people represents a heavy economical burden and authorities do not propose any other solution than the return of displaced persons.

To win the citizens’ understanding, authorities keep claiming that radiation-induced cancer does not occur, or is undetectable even if it occurs, under the integrated exposure dose of 100 mSv although international recommendations on protection against radiations are based on the central assumption of a no-threshold linear dose–response relationship for the induction of cancer and heritable effects. And with a limit of 20mSv per year, 100 mSv might be quickly reached.

Consequently, Japanese authorities have changed their policy and introduced a new way of measuring the dose. Evacuation policy was based on the airborne dose rate that can be easily measured by various methods, including simple radiameters. Then, to estimate the annual dose, it is supposed that individuals spend 8 hours per day outdoors and that indoors, exposure is reduced by 60%. For the return, authorities will provide an individual dosimeter or glass-badge to register each individual cumulative dose, without mentioning that this apparatus gives an overall value that is 30 to 40% lower from what can be deduced with an apparatus measuring airborne dose rate.

This new policy is also a change of paradigm: Individuals will be in charge of their own protection against radiations. On the contrary to nuclear workers who are supposed to be well controlled, nobody controls if the population wear such individual dosimeters. This is crucially problematic for children who are more sensitive to radiations. Continuously controlling one’s life is a heavy burden that is hardly accepted, especially when there are children for which it is not a bright future to propose.

30 years after the Chernobyl disaster, international radiological protection rules and practices are not adapted for populations living in contaminated territories. They are extremely confusing and impossible to enforce, allowing authorities to adapt rules to their own advantage rather than the affected populations. Rule should be binding in terms of limits, temporal evolution and operational quantities.

Food contamination

Regarding the food issue, Japanese authorities initially failed to foresee the scale of problems with contaminated food and crops, and were repeatedly caught by surprise in the following months. As a consequence, many people’s trust in the government was eroded and the population concerned about food safety reconsidered their relationship to the state and to the food.

But citizens, famers, producers, retailers and consumers have been monitoring food production forcing authorities to introduce systematic controls. Situation has quickly improved and except for wild plants and animals, including fishes and self-production, contamination of the food found on the market remains low. Internal contamination of children checked by whole body counting is also low enough to consider that external dose is the dominating problem for residents in contaminated territories. This success has a cost: many farmers cannot resume farming and some traditional productions might disappear.

The food issue shows the merit of an open process in which every one can check the contamination and adapt its diet to its own requirement. Nevertheless consumers are still reluctant to buy food produced in contaminated territories and producers, including farmers, fishermen and foresters are still suffering five years later.

Government’s policy was focused on food safety (anzen in Japanese), but it did not address how to generate a climate of trustworthiness (anshin in Japanese) about food. Enforcing technical standards alone is not sufficient to overcome consumer mistrust. The challenge is to bring together food safety and the peace of mind that comes with it.

What future for evacuated territories?

Japanese government decided to withdraw evacuation orders by March 2017 and stop compensations by March 2018, except in the so-called difficult-to-return zones. Even J-Village, a former training centre for football, changed into a base for the workers at the FDNPP will turn back to sports before the 2020 Olympic games.

As a matter of fact, Japanese authorities dream of a reversible disaster while international recommendations on post-accident management only focus on the return to normalcy. With a half-life of 30 years, caesium-137 decays too slowly. Japanese government has launched a huge decontamination programme in both non-evacuated and evacuated territories where the annual dose is higher than 1 mSv, except for the difficult-to-return areas. It consists on scrapping the soil, cutting the grass, trees, bushes and washing to roof of dwellings, roads, and sidewalks… in the vicinity of dwellings and other buildings, changing villages and towns into oasis in the middle of a vast contaminated land. In evacuated territories, decontamination plans covers about 24 800 ha and there are no such plans for the surrounding land, including forests and mountains that cover about 70% of Fukushima prefecture.

Decontamination is not very effective and generates huge amount of waste for which all proposed solutions failed because of the opposition of the populations. Actually, handling radioactive waste is a difficult issue in all countries that have accumulated significant amounts. But after a severe nuclear accident, it is even more difficult and volumes are enormous. 20 millions cubic meters are expected in Fukushima prefecture and the projected storage centre will cover 16 km2. Projects are stalled in Fukushima and other prefectures, but authorities stick to their authoritative attitude that is a complete failure: Decide – Announce – Defend (DAD). In the mean time waste is piling up in bags that are quickly damaging.

Decontamination proved to be deceiving as dose rates have not significantly fallen compared to what can be observed in the forest. Nevertheless authorities keep encouraging inhabitants to come back.

Residents are reluctant to come back

So far, evacuation orders were lifted in parts of Tamura and Kawauchi in 2014, and in Naraha in 2015. All these areas lie within the less contaminated parts of the 20 km evacuation zone. Evacuation recommendations around scattered hot-spots are also completely lifted. But residents are reluctant to come back and contaminated areas are facing aging and depopulation problems.

The town of Hirono, which lies between 20 and 30 km from the FDNPP, was included in the emergency evacuation preparation zone. Residents are expected to return, but according to the latest census in 2015, large portion of the present population is involved in nuclear reactor decommissioning work: the male population is up 2.3% from 2010 whereas the female population, on the other hand, was down 42.3%. In Minami-Soma, the population declined to 66% of that prior to the accident and the average resident age increased by 14 years, a level that was expected in 2025.

Facts prove that return to normalcy is impossible after a large-scale nuclear disaster such as the ones that occurred at Chernobyl and Fukushima. United Nations’ guidelines on internally displaced persons urge authorities to ensure the full participation of internally displaced persons in the planning and management of their return or resettlement and reintegration. But in Japan their participation is reduced to “explanation meetings” (setsumeikai) usually organized behind closed doors without any presence of media, NGOs, legal or independent experts and thus leaving evacuees with little recourse.

Affected communities see no end to the severe hardship they are facing and are suffering. To stay or to flee, to come back or to relocate are difficult choices in a no-win situation. Number of people suffering from psychological disorders such as depression and post-traumatic stress disorder is larger than usual among both evacuated and non-evacuated people. The number of suicides related to the disasters is larger in Fukushima than in Miyagi or Iwate that were hit by the tsunami.

Conclusions

The impact of the accident still continues, and responses that can be accepted by the affected populations are urgently required. Residents in the affected areas are still struggling to recover from the effects of the accident. They continue to face grave concerns, including the health effects of radiation exposure, the dissolution of families, disruption of their lives, and the environmental contamination of vast areas of land. As nuclear disasters last for decades affected population see no end to the severe hardship they are facing.

After a nuclear disaster, many residents distrust authorities and official experts that failed to protect them. But recovery paths require a good coordination between authorities and the populations. Solutions cannot ignore the specific needs and demands of the affected populations, as well as their suggestions. This means new ways for deliberation and decision. Solutions might differ from families or communities. There is no good solution and each decision should be evaluated and then adapted. Beyond the pain of the affected persons, a nuclear disaster also shakes the ground of democracy.

Japanese citizens have proved to be resourceful about the measurement of radioactivity. Citizen mapping of the contamination was done all over and food monitoring prompted authorities, producers, and retailers to strengthen their controls and finally led to a decrease of intake of radioelements. Why such an open process that proved to be effective is not possible when deciding about the fate of contaminated territories and affected population?

Rencontres ACRO : Conférences et débats à Caen le 9 mars 2016, 20H00.

A l’occasion des 30 ans de la catastrophe de Tchernobyl et des 5 ans de celle de Fukushima, l’ACRO vous invite à une rencontre, le mercredi 9 mars 2016 à 20h00, à la Maison des Associations de Caen, 7 bis rue neuve Bourg l’Abbé. Au programme :

– Fukushima 5 ans après, retour à l’anormal
Depuis le début de la catastrophe, l’ACRO effectue un suivi régulier de ses développements et de ses conséquences. Un bilan de la situation à la centrale et autour sera présenté à l’occasion du cinquième anniversaire.
Alors que quelques 100 000 personnes restent déplacées par cet accident, quels sont les défis qu’il reste à relever ?
Fin février 2016, l’ACRO était au Japon sur le Rainbow Warrior III de Greenpeace pour l’assister dans sa campagne de mesure de la pollution radioactive des fonds marins au large de la centrale. Un premier retour sera présenté.
– Tchernobyl : retour sur une catastrophe et ses conséquences
30 ans déjà ! une bonne partie de nos jeunes concitoyens n’ont pas « vécu en direct » la plus grande catastrophe nucléaire de notre histoire. Cette rencontre sera l’occasion de revenir sur les premiers jours de cet accident majeur, l’ampleur de la contamination radioactive des territoires et ses conséquences sanitaires actuelles et en devenir.
– Tchernobyl 30 ans après : bilan de la cartographie citoyenne
L’ACRO a mené d’octobre 2014 à février 2016 une grande campagne de prélèvements en France et en Europe afin de réaliser une cartographie citoyenne de la contamination actuelle en Césium-137, 30 ans après la catastrophe de Tchernobyl. Un bilan sera ainsi présenté lors de ces rencontres. En 30 ans, la radioactivité du césium-137 devrait avoir diminué de moitié par rapport à 1986 pourtant elle est loin d’avoir disparu.

Ces trois rapides présentations seront suivies d’un échange avec la salle oh combien important dans le contexte actuel concernant l’énergie nucléaire. Venez donc nombreux !

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L’ACRO assiste Greenpeace dans sa campagne de mesure de la radioactivité des fonds marins à Fukushima

Le Rainbow-Warrior III de Greenpeace est de nouveau à Fukushima pour une campagne de mesure de la contamination des fonds marins au large de la centrale accidentée de Fukushima daï-ichi.

L’ACRO est à bord pour assister Greenpeace dans cette opération. Chikurin, le laboratoire indépendant monté à Tôkyô avec le soutien de l’ACRO est aussi partenaire.

A suivre sur notre site dédié à la catastrophe de Fukushima.

Voir le témoignage de Mylène Josset, chargé d’études à l’ACRO, en mission sur le Rainbow Warrior III au large de Fukushima (site de Greenpeace)

Cuve de l’EPR, l’ACRO dénonce la politique du fait accompli

Le couvercle de l’EPR, attendu dans la journée à Flamanville, tout comme le fond de cuve, déjà en place, ont été déclarés non conformes aux règles de sûreté. Areva procède actuellement à des essais complémentaires pour tenter de qualifier l’acier qui a servi à leur fabrication. Sans attendre les résultats, le couvercle de l’EPR est apporté à Flamanville afin de préparer son installation. De nombreux instruments vont y être fixés. Areva et EdF tentent-elles de forcer la main des autorités avec cette politique du fait accompli ?

Alors que la Ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie a saisi le Haut Comité à la Transparence et à l’Information sur la Sécurité Nucléaire (HCTISN), avec notamment, comme mission, d’émettre un avis sur les “mesures prises par AREVA et EDF pour assurer l’information du public” sur ce dossier, il est cocasse de constater que c’est Greenpeace qui annonce l’arrivée de ce couvercle. L’ACRO siège dans le groupe de travail du HCTISN.

Etant donné l’importance de l’enjeu pour la sûreté de la cuve, dont la défaillance doit être exclue, il est inquiétant de voir avec quelle légèreté est traitée ce dossier par le fabricant et le client.

Cliquez ici pour voir la version PDF (CP du 12.02.16)

Fukushima, 5 ans après : quel impact sanitaire ?

A un mois du cinquième anniversaire de la catastrophe de Fukushima,
l’ACRO publie en ligne un premier rapport sur son impact sanitaire.
D’autres rapports vont suivre d’ici le 11 mars 2016. A retrouver sur
http://fukushima.eu.org

L’Association pour le Contrôle de la Radioactivité dans l’Ouest (ACRO) s’est
beaucoup investie à Fukushima en étant sur le terrain dès les premiers
jours. Elle a soutenu la création d’un laboratoire indépendant de la
radioactivité à son image au Japon qui est en pleine expansion :
http://chikurin.org

L’ACRO effectue aussi un suivi régulier des évènements sur place sur un
site Internet dédié : http://fukushima.eu.org

Enfin, à l’occasion du trentième anniversaire de la catastrophe de
Tchernobyl, l’ACRO a effectué une cartographie citoyenne de la pollution
radioactive rémanente à retrouver sur http://tchernobyl30.eu.org
Plus de 350 échantillons ont déjà été analysés.

Pastilles d’iode : les Français sont particulièrement mal protégés en cas d’accident nucléaire

Communiqué commun Greenpeace – ACRO

La France s’apprête à renouveler la distribution de comprimés d’iode dans un rayon de 10 km autour des 19 centrales nucléaires françaises sans prendre en compte, ni les enseignements des catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima, ni les recommandations européennes. Pour Greenpeace et l’Association pour le Contrôle de la Radioactivité dans l’Ouest (ACRO), cette distribution doit être étendue à 100 kilomètres autour des réacteurs nucléaires.

En effet :

  • Il existe un consensus international pour reconnaître que l’iode radioactif libéré lors d’un accident nucléaire peut être à l’origine d’une augmentation des cancers de la thyroïde chez les jeunes comme cela a été observé après la catastrophe de Tchernobyl, jusqu’à 500 km de la centrale accidentée.
  • Lors de l’accident de Fukushima, la zone dans laquelle la dose à la thyroïde pouvait dépasser les critères de prophylaxie fixés par l’Agence internationale de l’énergie atomique (50 mSv sur les 7 premiers jours) s’étendait jusqu’à environ 50 km de la centrale bien que les rejets soient allés à 80% vers l’océan.
  • AtHLET, le groupe de travail européen sur l’urgence nucléaire, mis en place par les autorités de sûreté et les autorités compétentes en radioprotection, a conclu que l’évacuation doit être préparée jusqu’à 5 km et, la prophylaxie à l’iode ainsi que la mise à l’abri jusqu’à 20 km. Il recommande, en outre, qu’une stratégie soit mise en place pour évacuer jusqu’à 20 km et mettre à l’abri et protéger la thyroïde jusqu’à 100 km.
  • En Allemagne, la Commission de Protection Radiologique (Strahlenschutzkommission) a conclu qu’il pourrait être « nécessaire d’administrer de l’iode stable aux enfants, jeunes et femmes enceintes qui sont bien plus éloignés de la centrale (>100 km) mais sous les vents. Les calculs ont montré que les limites de dose peuvent être dépassées jusqu’à 200 km autour des centrales allemandes. Les distances supérieures à 200 km n’ont pas été étudiées » car cela couvre déjà presque tout le territoire national.

La France s’illustre par un paradoxe choquant : étant donné le nombre record de réacteurs nucléaires sur son territoire, sa population est l’une des plus exposées dans le monde au risque d’un accident nucléaire. Mais dans le même temps, elle est particulièrement mal protégée par le plan de distribution d’iode en vigueur. Cette situation n’est pas acceptable. Il y a donc urgence à appliquer les mesures que les autorités compétentes ont admises au niveau européen

La France doit étendre la pré-distribution d’iode stable jusqu’à 100 kilomètres autour des réacteurs nucléaires afin de pouvoir protéger plus efficacement sa population en cas d’accident grave. Au-delà de cette zone, les plans de distribution de l’iode en situation d’urgence doivent être évalués et testés.

Actuellement, la distribution des comprimés d’iode est :

  • dans un rayon de 20 km en Belgique ;
  • dans un rayon de 50 km en Suisse ;
  • dans tout le pays au Luxembourg, c’est à dire jusqu’à une centaine de kilomètres de la centrale française de Cattenom ;
  • et… dans un rayon de 10 km en France.

Surveillance radioécologique autour de la centrale nucléaire de Gravelines – 2014

Surveillance radioécologique réalisée autour de la centrale nucléaire de Gravelines – Bilan des résultats 2014

Rapport d’étude réalisé pour la Commission Locale d’Information de Gravelines, résultats, commentaires et mises en perspectives.

Analyses de sols alpins réalisées en 2015 pour “Les enfants de Tchernobyl”

Analyse des niveaux de radioactivité artificielle de sols des Alpes, en 2015.

Etude réalisée par l’ACRO pour l’association Les Enfants de Tchernobyl dans le cadre de la campagne Tchernobyl, 30 ans après?
Tous les résultats de cette opération sont disponibles sur la carte interactive : http://tchernobyl30.eu.org/resultats/