Catastrophe de Fukushima – Nouvelles données sur la contamination des enfants japonais

Communiqué de presse et résultats

福島県の災害 – 日本の子供の汚染に関する新たなデータ

Version anglaise

Extraits du “Six – Sept” du 31 mai 2011

France-Inter

Frédéric Charles, correspondant au Japon, à 47’43 :

“Il faut se référer plutôt à une association française, pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest, ACRO par exemple, elle est plus indépendante que les officines du gouvernement japonais. L’ACRO affirme que la pollution radioactive à Fukushima est comparable à celle que l’on trouve aujourd’hui autour de Tchernobyl. Et cette pollution s’étend bien au-delà de la préfecture de Fukushima, ce que refuse d’admettre le gouvernement. Dans les légumes analysés à Sendai, au Nord de Fukushima, et plus au Nord encore, dans la préfecture de Miyagi, les teneurs en césiums 134 et 137 relevées dans les légumes sont supérieures aux limites fixées par la réglementation japonaise, ce qui les rend impropre à la consommation. Mais le gouvernement japonais se contente d’interdire la vente de produits agricoles cultivés dans un rayon seulement de 30 à 40, voire 50 km autour de la centrale, alors que la contamination, elle, est détectée à 270 km de la centrale, au Nord comme au Sud, jusqu’à Tokyo, dans des plantations de thé ou des stations de retraitement de l’eau.

Par ailleurs, le gouvernement ne dit pas aux habitants du Tohoku des zones sinistrées, “cessez de manger les légumes que vous cultivez”. De nombreux habitants ou des agriculteurs continuent d’en manger. Et la radioactivité relevée dans le sol des cours d’écoles primaires de cette région est aussi très élevée.”

Les enfants de Fukushima sont contaminés

Communiqué de presse du 30 juin 2011
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A la demande de citoyens japonais, l’ACRO a analysé les urines d’une dizaine d’enfants vivant dans la ville de Fukushima, à environ 60 km de la centrale nucléaire. Les résultats sont sans ambiguïté : toutes les urines sont contaminées en césium 134 et césium 137 à des concentrations allant de 0,4 à 1,3 becquerels par litre.

Cela signifie que ces enfants, âgés de 6 à 16 ans, sont tous contaminés en césium 134 et césium 137 et qu’ils l’ont probablement aussi été en iode 131. Ce dernier élément disparaît plus vite et l’on ne le détecte plus.

Il est difficile à ce stade, d’évaluer la contamination du corps entier à partir de ces données. Mais ces résultats devraient inciter les autorités japonaises à mesurer systématiquement la contamination interne des habitants qui ont été exposés aux panaches radioactifs et de ceux qui vivent dans les territoires contaminés et qui sont donc vraisemblablement soumis à une contamination chronique. Cela peut se faire sans difficulté technique (par anthropogammamétrie).

Les résultats de la mesure de la contamination interne devront ensuite être pris en compte dans l’évaluation des doses reçues par la population.

Cela nous conforte aussi dans l’idée que la limite fixée par les autorités japonaises pour déterminer les zones d’évacuation est trop élevée. Elle est de 20 millisieverts pour la première année, ce qui est fortement critiqué par de nombreuses organisations dont l’ACRO. En effet, elle est deux fois plus élevée que la limite française en cas d’accident et 20 fois plus élevée que la limite maximale admissible pour le public en temps normal.

Or, le calcul de dose effectué par les autorités japonaises pour déterminer les zones d’évacuation ne prend pas en compte cette contamination interne qui est due à l’exposition directe au panache radioactif et/ou à l’alimentation contaminée. Et cette contamination interne vient s’ajouter aux autres voies d’exposition aux radiations dues à la pollution radioactive. Il est donc impératif d’abaisser la limite due aux autres voies d’exposition.

L’ACRO a reçu de nouveaux échantillons du Japon qu’elle continue d’analyser gracieusement en attendant de pouvoir ouvrir un laboratoire sur place dès qu’elle aura rassemblé les fonds nécessaires. Toute aide financière est la bienvenue.

Les résultats sont en ligne ici

Version anglaise

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La catastrophe nucléaire expliquée aux (grands) enfants

ACRO
138, rue de l’Eglise
14200 Hérouville St Clair
https://acro.eu.org

Pour faire de l’électricité, la méthode la plus répandue consiste à faire tourner des aimants, comme dans une dynamo de vélo. C’est le cas par exemple avec les éoliennes où c’est le vent qui travaille, ou avec l’eau des barrages qui chute de la montagne.

Mais quand on n’a pas sous la main de l’air ou de l’eau qui bougent naturellement, comment fait-on pour faire tourner les aimants ? On utilise de la chaleur : quand on fait chauffer de l’eau dans une cocotte-minute, la vapeur qui sort à grande vitesse peut faire tourner une hélice qui va faire tourner des aimants qui vont faire de l’électricité.

Pour faire chauffer l’eau, on peut brûler du bois, du gaz, de l’essence… ou utiliser une centrale nucléaire. Le nucléaire est la méthode la plus compliquée pour faire chauffer de l’eau qui va faire tourner les aimants qui vont faire de l’électricité. C’est aussi la plus dangereuse, comme le Japon vient de l’apprendre à ses dépens.

Pourquoi c’est dangereux ? Parce que dans une centrale nucléaire, on casse en deux l’atome le plus lourd que l’on trouve dans la nature que l’on appelle uranium (voir la radioactivité expliquée aux enfants). Cela dégage de la chaleur, beaucoup de chaleur. Mais les deux morceaux, qui sont des atomes plus petits, sont radioactifs. Il faut donc s’en protéger.

Pour cela, l’uranium est enfermé dans une gaine métallique, pour empêcher que les atomes radioactifs aillent dans l’eau. En fait, on ne peut pas tous les empêcher de sortir et l’eau devient radioactive. On essaye qu’il y en ait le moins possible qui sortent.

La cause de tous les malheurs à Fukushima, c’est la chaleur dégagée par les barres d’uranium, même quand on a arrêté la centrale nucléaire.

Il faut donc les refroidir, sinon le métal fond et les atomes radioactifs polluent l’eau qui devient à son tour très radioactive. Pour cela, on a besoin d’eau et de pompes qui pompent l’eau chaude pour la refroidir et la remettre dans la cocotte-minute (appelée cuve par les adultes). Ces pompes utilisent de l’électricité.

A Fukushima, les réacteurs nucléaires qui étaient en marche se sont arrêtés automatiquement après le tremblement de terre. La centrale nucléaire ne produisait donc plus d’électricité. En plus, les lignes électriques qui auraient pu amener de l’électricité d’ailleurs étaient coupées. Sans électricité, plus de pompe. Et sans circulation d’eau, les barres d’uranium chauffent.

Il y a donc des moteurs de secours qui font de l’électricité. Cette fois-ci, on utilise de l’essence pour faire tourner un moteur, qui entraîne des aimants qui vont faire de l’électricité qui va faire marcher les pompes qui vont refroidir la centrale nucléaire. Une panne à un seul endroit le long de cette chaîne, et les problèmes arrivent.

C’est ce qui s’est passé : le tsunami qui a inondé la centrale nucléaire moins d’une heure après le tremblement de terre et a ravagé une grande partie des côtes japonaises, a provoqué l’arrêt des moteurs de secours. Dans ce cas, il y a des batteries qui peuvent remplacer, mais elles ne durent pas longtemps.

En plus à Fukushima, le tremblement de terre a endommagé les tuyauteries et il a rapidement manqué d’eau. C’est donc, de l’eau de mer qui a été utilisée, le temps de réparer les tuyaux.

Si les combustibles chauffent, l’eau se met à bouillir. La pression monte dans la cocotte-minute et la température monte encore. A partir de 300°C, certains joints ne tiennent plus : l’eau commence à fuir.

Tout n’est pas encore clair, mais il est fort probable que le tremblement de terre a aussi bien endommagé les réacteurs de la centrale et provoqué des fuites d’eau. En effet, sans électricité, il n’y a plus d’instruments pour mesurer la température, la pression etc et donc savoir ce qui se passe dans le réacteur.

Quand l’eau s’est évaporée, la partie émergée des barres d’uranium, qui font 4 mètres de long, chauffe encore plus. Le métal des barres commence à se fissurer, ce qui libère les petits atomes radioactifs. L’eau devient très radioactive. L’air aussi. Cela aurait commencé à peine 3 heures après le tremblement de terre dans le réacteur n°1.

En plus, au niveau de la gaine métallique hors de l’eau, une réaction chimique dégage de l’hydrogène qui est très explosif. TEPCo, le propriétaire de la centrale, estime que 800 kilogrammes d’hydrogène ont été produits dans le réacteur n°1. Et à peine plus de 24 heures après le séisme, une forte explosion hydrogène a détruit partiellement le bâtiment abritant le réacteur n°1. Il y aura des explosions dans 4 réacteurs en tout.

On a vu que l’eau dans le réacteur est devenue très radioactive et qu’il y a des fuites qui vont rendre tout le réacteur radioactif. Les hommes ne peuvent plus approcher. L’inondation des sous-sols empêche aussi de rebrancher l’électricité qui est revenue.

L’eau continue à s’évaporer : la pression à l’intérieur de la cocotte-minute pourrait la faire exploser. Il faut donc laisser sortir des gaz. Les gaz radioactifs sont emportés par le vent et polluent de vastes territoires. Les gens doivent partir.

Une fois qu’il n’y a plus d’eau dans le réacteur, la température monte encore plus et peut atteindre presque 3 000°C. Les barres fondent et tombent au fond de la cuve en métal qui peut se percer et cela coule plus bas. On parle de « fusion du cœur ».

Dans le réacteur n°1 de Fukushima dai-ichi, la fusion du cœur a eu lieu en moins de 16 heures. Personne n’a pu l’empêcher. La fusion du cœur a eu lieu dans les réacteurs n°2 et 3 qui en sont aussi mauvais état. Les cuves métalliques d’une épaisseur de 16 cm sont probablement percées.

Pour se protéger, la cocotte-minute est enfermée dans un coffre-fort en béton armé appelé « enceinte de confinement ». C’est la dernière barrière entre le combustible fondu très très radioactif et le monde extérieur. Mais, cette barrière est aussi fissurée, voir percée et l’eau très radioactive fuit. Elle coule dans les sous-sols qui sont remplis d’eau radioactive et peut déborder dans la mer. Il y a déjà eu des débordements des réacteurs n°2 et 3 et la mer est fortement polluée.

Même fondu en fond de cuve, le combustible doit toujours être refroidi. TEPCo a d’abord injecté de l’eau à l’aide de camions pompe, puis de pompes plus classiques. L’eau injectée s’écoule par les fuites dans les sous-sols. Cela ne peut pas durer longtemps comme cela.

Bref, suite à la fusion des cœurs, on est passé de la cocotte-minute étanche à la cafetière : le jus qui sort du percolateur est devenu le principal problème. Il y en a déjà 120 000 tonnes ou 120 000 mètres cube qui se sont accumulés dans les sous-sols.

TEPCo a construit à la hâte une station d’épuration avec l’aide de compagnies étrangères pour filtrer l’eau des sous-sols avant qu’elle ne déborde dans la mer et la réinjecter dans les réacteurs pour les refroidir. Puis elle s’est vantée d’avoir réussi à refroidir les réacteurs « en circuit fermé » en si peu de temps.

Parler de circuit fermé est un peu abusif non ? L’eau injectée continue à fuir dans les sous-sols où elle doit être pompée. Une partie de cette eau s’évapore et continue à polluer l’environnement. Une autre partie s’infiltre dans la terre. Il en a encore pour des années avec ce fonctionnement car il n’est pas possible d’approcher pour boucher les trous et arrêter les fuites. C’est trop radioactif. TEPCo veut donc construire une immense barrière souterraine tout autour de la centrale qui irait jusqu’à la roche pour empêcher cette eau polluée d’aller plus loin.

Mais ce n’est pas tout ! Le combustible qui sort des centrales nucléaires reste chaud pendant des années. On l’entrepose temporairement dans des piscines que l’on doit refroidir. Il y a une piscine par réacteur.

Suite au tremblement de terre et tsunami, les piscines des 6 réacteurs de la centrale de Fukushima n’ont plus été refroidies et sont devenues aussi menaçantes que les réacteurs, voire plus. En effet, elles ne sont pas protégées par une enceinte de confinement. Mais comme le combustible est plus ancien, il est moins chaud et l’eau s’évapore moins vite. Sauf au niveau du réacteur n°4 : la piscine était pleine avec des combustibles anciens et des combustibles usés très chauds qui venaient à peine de sortir du réacteur.

Il y a aussi eu une explosion hydrogène et un incendie à proximité de la piscine n°4 qui a fait craindre le pire. Mais depuis, TEPCo a réussi à filmer l’intérieur de la piscine et il semblerait que le combustible n’ai pas fondu.

Début août, les 6 piscines sont refroidies. Pour celles des réacteurs 1 à 4, TEPCo a dû mettre en place un nouveau système de refroidissement.

Les réacteurs n°5 et 6 étaient à l’arrêt et une partie de leur combustible était entreposée dans leur piscine respective. Un générateur d’électricité diesel a pu rapidement être remis en route et leur refroidissement contrôlé. Ils ne posent plus trop de problèmes.

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La radioactivité expliquée aux enfants

ACROnique du nucléaire n°101

suivie de

ACRO
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Toute la matière qui nous entoure, l’eau, l’air, la terre…, nous, sommes faits de petits grains, extrêmement petits que l’on appelle « atomes ». Il y en a 92 différents en tout. Comme pour les blocs de légo, tout dans l’univers, des étoiles à nous, est « fabriqué » à partir de ces 92 atomes. Il y a d’autres atomes fabriqués par l’homme.

Chaque atome a un nom : le numéro 1, qui est le plus petit, s’appelle « hydrogène » et le n°92, qui est le plus lourd, « uranium ». Entre les deux, il y a sûrement des noms que tu connais, comme oxygène, or, fer… Deux atomes d’hydrogène accrochés à un atome d’oxygène forme un petit bloc qui est l’eau.

Mais je m’écarte du sujet. Certains de ces atomes sont dits « radioactifs ». Comme un canon, ils peuvent tirer un petit obus encore plus petit que l’atome lui-même. Ce sont ces petits obus qui sont dangereux, car ils peuvent traverser le corps humain comme quand on va faire une radio.

Dans un réacteur nucléaire, il y a énormément d’atomes radioactifs qui tirent des obus. C’est pourquoi ils sont enfermés dans un coffre-fort que l’on appelle « enceinte de confinement ». Le problème à la centrale de Fukushima, c’est que les atomes radioactifs s’échappent dans l’eau et dans l’air. Certains retombent près de la centrale, d’autres sont emportés par les vents tout autour de la Terre.

Un atome radioactif ne vise pas. S’il est à côté de nous, il y a des chances que l’obus parte au loin. Mais si l’on mange des légumes pollués, que l’on boit de l’eau polluée ou que l’on respire de l’air pollué par des atomes radioactifs, les obus tirés par les atomes dans le corps vont faire des dégâts à tous les coups !

Evidemment, il y a beaucoup plus d’atomes qui retombent près de la centrale accidentée. C’est pourquoi toute la centrale et ses environs sont très pollués par des atomes radioactifs qui tirent dans tous les sens.

Les travailleurs sur place, se protègent en s’emballant dans un vêtement qui les recouvre entièrement et mettent un masque sur le visage pour ne pas respirer de poussière radioactive. Mais ils ne peuvent rien contre le bombardement radioactif et ne peuvent donc pas rester longtemps sur place.

Quand on est loin et qu’il y a peu d’atomes, on risque moins d’être bombardé. Le principal problème est alors l’alimentation et la boisson.

La plupart des atomes radioactifs ne peuvent tirer qu’une seule fois, un ou deux obus à la fois. Après, ils ne sont plus radioactifs. Certains tirent très vite et la pollution ne dure pas longtemps, faute de munitions. C’est le cas par exemple pour l’atome appelé « iode 131 » qui était rejeté à Fukushima. Au bout de huit jours, il n’en reste que la moitié qui sont radioactifs. Après seize jours, plus qu’un quart. Et ainsi de suite… Pour celui appelé « césium 137 », cela prend trente ans et donc la pollution radioactive va rester longtemps ! C’est pourquoi il faudra un système de surveillance de la pollution pendant de longues années pour se protéger.

Le becquerel sert à compter le nombre d’atomes radioactifs : si l’on te dit qu’il y a 1000 becquerels, cela veut dire qu’il y a 1000 tirs d’obus par seconde.


La mesure de la radioactivité expliquée aux enfants

On a vu que la radioactivité était due à de méchants atomes tout tout petits qui pouvaient lancer des obus minuscules. Il y a deux façons d’être atteint par ces obus.

Soit l’on est dans une zone où il y a beaucoup d’atomes radioactifs qui tirent dans tous les sens et la seule façon de se protéger est de s’éloigner. C’est pourquoi les gens qui habitent autour des centrales de Fukushima ou de Tchernobyl ont dû partir.

La radioactivité, on ne la sent pas, on ne la voit pas, on ne l’entend pas. Alors il faut la mesurer avec des appareils spéciaux pour s’en protéger.

La mesure de cette forte radioactivité peut se faire avec de petits appareils qui comptent le nombre d’obus qui les cognent. Plus il y a d’obus et plus c’est dangereux.

Comment sait-on si c’est un peu dangereux, moyennement dangereux ou très dangereux ? Alors là, cela devient très compliqué car il y a plusieurs sortes d’obus : certains font plus de mal que d’autres. En plus, tous les obus ne cognent pas tous avec la même force : certains ont plus d’énergie que d’autres et sont donc plus dangereux.

Pour estimer la gravité des blessures dues aux obus, on utilise le sievert. Une personne qui reçoit quelques sieverts risque de mourir après quelques mois. Généralement, on compte donc avec une unité plus petite, le millisievert, comme pour les millimètres. La population ne doit pas recevoir plus d’un millisievert par an car les obus peuvent provoquer des cancers ou d’autres maladies qui apparaîtront bien plus tard.

Il existe des petits appareils qui peuvent mesurer les millisieverts pour surveiller tout cela.

Quand les atomes radioactifs sont à côté de toi, ils tirent dans tous les sens sans viser et seulement une petite partie peut t’atteindre. Il en faut beaucoup pour être dangereux. Mais si les atomes radioactifs sont dans ton corps, tous les obus vont te blesser et une toute petite quantité suffit à être dangereuse.

Il faut donc faire attention aux aliments que l’on mange, à l’air que l’on respire et à l’eau que l’on boit. C’est pour cela qu’il faut les surveiller en mesurant la quantité d’atomes radioactifs. Et là, c’est plus difficile parce qu’il y a déjà de la radioactivité dans la nature contre laquelle on ne peut rien, puisqu’il y en a partout.

En essayant de compter le nombre d’obus tirés par les atomes radioactifs d’un bol de myrtilles par exemple, on va avoir des obus qui viennent des myrtilles, mais aussi du bol, de la table etc etc. Si les myrtilles sont peu radioactives, on pourra rester à côté d’elles sans danger, mais il se peut que l’on ne puisse pas les manger. Comment faire alors pour savoir ?

A l’ACRO, comme dans les autres laboratoires, on utilise deux astuces : d’abord on enferme le bol de myrtilles dans un coffre-fort en plomb qui arrête les obus naturels qui viennent de loin. Et puis, l’appareil que l’on utilise est plus sophistiqué que ceux dont j’ai parlés avant : ils peuvent mesurer l’énergie des obus et faire un tri entre les obus qui viennent de la nature et les obus qui viennent de la pollution dans les myrtilles. Ainsi, on peut dire exactement combien d’atomes radioactifs dus à la pollution sont dans les myrtilles et donc décider si on peut les manger ou non. Une mesure peut prendre plusieurs heures.

On exprime le résultat en becquerel : cela permet de savoir combien il y a d’atomes radioactifs dans l’alimentation, l’eau et l’air. Le gouvernement japonais a décidé par exemple qu’il ne devait pas y avoir plus de 500 becquerels de césium 137 dans un kilo d’aliment.

On ne peut pas mesurer directement la gravité des blessures que tu auras si tu manges un aliment contaminé. On fait alors des calculs pour savoir combien de millisieverts cela fait.

Tous ces millisieverts s’ajoutent et il faut faire attention.


Les effets de la radioactivité expliqués aux enfants

Dans « la radioactivité expliquée aux enfants », nous avons vu que les atomes radioactifs peuvent tirer un petit obus encore plus petit que l’atome lui-même. Ce sont ces petits obus qui sont dangereux, car ils peuvent traverser le corps humain comme quand on va faire une radio.

Si l’on prend une balle dans le cœur, on meurt à tous les coups, pas si c’est dans le bras. C’est un peu pareil avec la radioactivité : les obus microscopiques ne heurtent pas toujours une partie vitale. Il y a des chanceux et des malchanceux. On parle alors d’effets « stochastiques ». S’il y a beaucoup de radioactivité, et donc beaucoup d’obus tirés, il y a plus de risques de toucher une partie importante du corps. Il n’y a plus de chanceux : tout le monde tombera malade, voire mourra si la dose est très très forte. On parle alors d’effets « déterministes ».

Quand on veut protéger l’Homme, on veut protéger chaque individu, les chanceux comme les malchanceux. On va donc s’intéresser aux faibles doses, sachant qu’il n’y a pas de limite d’innocuité, chaque dose est engendre un risque, même la plus petite. Il y a déjà la radioactivité naturelle contre laquelle on ne peut rien. On n’accepte aucune dose de radioactivité supplémentaire créée par l’homme, sauf s’il y a un bénéfice. C’est le cas de certains malades par exemple, que l’on peut soigner grâce à la radioactivité, même si l’on prend le risque de provoquer d’autres maladies plus tard. Dans ce cas, on essaye alors que la dose de radioactivité administrée soit la plus basse possible. Et puis, il y a des limites à ne pas dépasser qui correspondent à un risque jugé acceptable.

Depuis quelques années, il est aussi devenu important de protéger aussi l’environnement. Pas uniquement l’Homme. Et là, les critères sont complétement différents. Ce que l’on veut protéger, c’est une espèce, pas chaque individu. Peu importe s’il y a des malades ou des morts. Ce qui compte, c’est que l’espèce survive. Certains vont même plus loin et pensent qu’il ne faut protéger que les espèces importantes des écosystèmes et pas nécessairement toutes les espèces. Ils sont donc même prêts à accepter la disparition de certaines espèces à cause de la radioactivité à la condition que l’écosystème survive.

C’est la même chose quand on construit une route et que l’on coupe une forêt par exemple. On accepte la destruction d’écosystèmes sous le prétexte qu’il en existe de similaires ailleurs.

Les études des effets de la radioactivité sur l’environnement ne s’intéressent donc qu’aux fortes doses et aux effets dits « déterministes ». Cela ne veut pas dire que les faibles doses n’ont pas d’effet. Il y a aussi des malchanceux chez les animaux ou les plantes. On ne s’y intéresse pas.

A partir de quand dit-on qu’il y a un effet ? Quand 50% d’une espèce a disparu ? Au bout de combien de générations ? Se pose aussi la question encore plus difficile des pollutions multiples : on peut imaginer qu’un animal ou une plante fragilisés par un polluant résisteront moins bien aux fortes doses de radioactivité. Bref, pour le moment, on ne connaît pas grand-chose, les recherches n’en étant qu’à leur début.

Le cas des abeilles est parlant : certains pesticides ne les tuent pas, mais il semblerait qu’ils font qu’elles se perdent et ne retrouvent plus leur ruche. Limiter les études aux décès n’est donc pas suffisant.

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La catastrophe nucléaire n’existe pas

Editorial de l’ACROnique du nucléaire n°93


La catastrophe nucléaire n’existe pas. Pour les gens bien-pensants, Tchernobyl est une catastrophe « soviétique ». Cela ne pouvait pas se produire en Occident : à Three Miles Island en 1979, l’enceinte de confinement avait permis d’éviter le pire. En France, au Blayais en 1999, on avait fait la preuve que l’on était les meilleurs au monde.

Et pourtant, dans le pays le mieux préparé à faire face aux catastrophes naturelles, qui est un des leaders technologiques de la planète, quatre accidents nucléaires simultanés ont lieu en ce moment. Les promoteurs du nucléaire ont bien tenté d’expliquer que cet accident était une catastrophe naturelle, ils n’ont convaincu personne.

Le Japon doit faire face à une catastrophe nucléaire de grande ampleur dont il n’a pas fini de panser les blessures. Il est évident que ni l’exploitant, ni les autorités n’ont les moyens d’y faire face. A l’heure d’Internet, toute la planète est au courant.

Durant les deux premiers mois de la catastrophe, TEPCo, l’exploitant, s’est complètement trompé sur l’ampleur des dégâts. Aucun expert institutionnel n’a rien trouvé à y redire. Il est fort probable qu’aucun pays n’aurait fait mieux dans une situation similaire.

Dès les premières heures de la catastrophe, l’ACRO a tout mis en œuvre pour s’informer et informer en continu de l’évolution des évènements. Notre site Internet est devenu une référence.

Depuis, presque toute notre énergie est consacrée à cette catastrophe et à ses conséquences. Les permanents et les bénévoles ne comptent plus leurs week-ends et leurs soirées sacrifiés. Les outils que nous avons développés depuis plusieurs années se sont révélés pertinents : dès l’arrivée du « nuage » radioactif en provenance de Fukushima, nous avons étendu notre Observatoire Citoyen de la Radioactivité à tout le territoire national, puis à la Suisse et au Luxembourg. La conjonction d’un laboratoire performant et d’un réseau de préleveurs volontaires a permis d’être très réactif.

Mais notre priorité a été de venir en aide aux populations japonaises exposées aux radiations. Dans l’urgence, nous avons étendu notre Observatoire au Japon et nous analysons gratuitement des prélèvements envoyés par un nouveau réseau de « préleveurs volontaires » sur place.

Cette solution n’est pas viable à long terme : nous nous efforçons d’accompagner la création d’un laboratoire indépendant similaire au nôtre au Japon. Le matériel de détection performant étant très onéreux, nous n’avons pas encore réuni toute la somme nécessaire, mais la générosité citoyenne qui s’est déjà manifestée nous permet d’espérer que notre projet aboutisse.

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Iitate-mura : un village fortement contaminé à 40 km de la centrale de Fukushima

Communiqué de presse du 11 avril 2011 (Télécharger la version pdf)


La situation des quatre réacteurs nucléaires de la centrale de Fukushima est loin d’être sous contrôle et des rejets dans l’atmosphère et dans la mer se poursuivent. Mais, un mois après le début des quatre catastrophes nucléaires, les conséquences sont déjà dramatiques bien au-delà de la zone d’évacuation des 30 km.

A la demande de citoyens japonais, l’ACRO, laboratoire associatif d’analyse de la radioactivité créé il y a 25 ans, juste après la catastrophe de Tchernobyl, a analysé gracieusement des échantillons de terre et d’eau en provenance des municipalités de Iitate, de Kawamata et de Fukushima, situées entre 40 km et 50 km au Nord Ouest de la centrale accidentée.

Les résultats des analyses effectuées par l’ACRO, dont le laboratoire est agréé, démontrent une situation alarmante : le sol des fermes et des champs de riz est fortement contaminé en tous les points où des prélèvements ont été faits. De l’iode 131, des césiums 134, 136 et 137… et de nombreux autres radioéléments ont été détectés. Les résultats complets sont ici en français et en anglais.

La contamination par l’iode 131 est prépondérante. Les niveaux sont tels qu’il serait prudent d’évacuer le village d’Iitate : au lieu dit Maeda, nous avons détecté 1,9 millions de becquerels par mètre carré.

Malheureusement, cette situation alarmante va perdurer, à l’instar de ce que l’on a observé dans les territoires contaminés de la région de Tchernobyl. Car si l’iode et la plupart des autres radioéléments détectés vont disparaître rapidement par décroissance radioactive quand les rejets auront cessé, ce n’est pas le cas du césium 137 qui a une période radioactive de 30 ans, c’est-à-dire qu’il diminue de moitié tous les 30 ans.

Le sol des fermes et des champs de riz est aussi fortement contaminé en césium 137 partout où des prélèvements ont été faits. A titre de comparaison, le gouvernement japonais vient de fixer à 5 000 becquerels de césium 137 par kilogramme de terre la limite au-dessus de laquelle il ne sera pas possible de cultiver le riz. Tous les sols de Iitate mesurés par l’ACRO sont au-dessus de cette limite. Seul le champ de riz d’Iisaka dans la commune de Kawamata est en dessous. C’est le lieu dit Maeda situé dans la commune d’Iitate qui est plus contaminé avec 39 600 becquerels par kilogramme de terre.

A titre de comparaison avec la situation en Biélorussie, où un droit à la migration avait été instauré à partir d’une contamination radioactive de 185 000 becquerels par mètre carré et un droit au relogement à partir de 555 000 becquerels par mètre carré, nous avons aussi exprimés nos résultats dans cette unité. Presque toutes les zones contrôlées par l’ACRO sont au-dessus de ces limites.

Une cartographie précise des retombées des rejets aériens est impérative.

Cette contamination provient des dépôts secs et des pluies, comme en témoignent les niveaux relevés dans de l’eau de pluie prélevée dans une bassine.

Dès le 12 mars, l’ACRO a mis en ligne un suivi en continu des évènements au Japon. Quand il est devenu évident qu’il s’agissait d’une catastrophe de grande ampleur, nous avons lancé un appel à souscription pour venir en aide aux populations japonaises confrontées à la pollution radioactive. Nous sommes plus que jamais convaincus de la nécessité d’aider au développement au Japon d’une expertise citoyenne similaire à celles exercées par l’ACRO en France et par les habitants des zones polluées en Biélorussie. Nous continuons donc à faire appel à la générosité pour favoriser son émergence.

Enfin, dès l’annonce de l’arrivée des particules radioactives en France métropolitaine, nous avons mis en place une surveillance de tout le territoire national à l’aide de notre réseau de préleveurs volontaires. Les résultats sont aussi en ligne ici.

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