Contexte
Dans un courrier daté du 30 janvier 2017, l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a saisi la Présidente de la CLI de Flamanville à propos du projet de modification du décret d’autorisation de création de l’installation nucléaire de base dénommée « Flamanville 3 ». Selon l’ASN, « l’objectif de cette modification est de porter à 13 ans, contre 10 aujourd’hui, le délai fixé par le décret pour la mise en service de l’installation. » Cette modification ne fait pas l’objet d’une consultation sur Internet.
La notice du projet de décret précise que « la construction du réacteur nucléaire de type EPR de Flamanville a pris du retard en raison d’aléas de construction. Le nouveau calendrier annoncé par Electricité de France prévoit une mise en service de ce réacteur pour le dernier trimestre 2018. L’article 3 du décret du 10 avril 2007 autorisant la création de l’installation nucléaire de base dénommée Flamanville 3, comportant un réacteur nucléaire de type EPR, sur le site de Flamanville (Manche) prévoyait un délai de mise en service de dix ans à compter de la publication de ce décret. Le présent décret modifie ce délai à treize ans. »
Avis de l’ACRO
La date de mise en service de l’EPR de Flamanville a déjà été reportée plusieurs fois. Contrairement aux affirmations d’EDF, rien ne garantit que sa mise en service sera possible d’ici 2020. En particulier, les calottes supérieure et inférieure de la cuve ne sont pas conformes car une concentration carbone anormalement élevée affecte leurs propriétés mécaniques. Cette anomalie est grave car l’hypothèse d’une défaillance de la cuve est exclue : elle doit être suffisamment robuste en toutes circonstances car il n’y a pas de cuve de secours. Par ailleurs, plusieurs irrégularités ont été relevées dans les rapports de qualité de plusieurs pièces forgées de ce réacteur.
- L’ACRO estime qu’il est donc préférable d’attendre les résultats des essais effectués par Areva sur les calottes de la cuve, de l’analyse effectuée par l’IRSN et de l’instruction des dossiers par l’ASN pour organiser un nouveau débat sur la mise en service de ce réacteur.
Depuis 2007, beaucoup de choses ont changé : la catastrophe de Fukushima a entraîné un renforcement des exigences de sûreté et le coût du réacteur a été multiplié par trois par rapport à ce qui avait été annoncé par EDF. Cela remet en cause l’opportunité de cette filière qui ne s’est pas exportée comme annoncé. A l’issue du débat national sur le projet d’EPR, la Commission Particulière de Débat Public (CPDP) avait estimé que « d’une façon générale les raisons, invoquées par le maître d’ouvrage, de réaliser l’EPR, impérieuses selon lui ont été faiblement éclaircies et justifiées ». Elles le sont encore moins maintenant.
- L’ACRO estime que le contexte a beaucoup changé depuis 2007 et que l’EPR devrait être justifié. Le nouveau dossier devrait présenter une analyse fine des raisons de l’explosion des coûts et des délais de construction.
Rappelons qu’à l’issue du débat public, EDF s’était engagée à investir autant dans les énergies renouvelables que dans l’EPR. Cet engagement ne semble pas avoir été tenu non plus.
- L’ACRO estime qu’il serait utile qu’EDF explique publiquement pourquoi elle n’a pas tenu ses engagements à l’issue du débat public.
Parce que l’EPR n’a pas tenu ses promesses et que le contexte a beaucoup changé en 10 ans, l’ACRO s’oppose à la prolongation sans garantie accordée à EDF pour l’autorisation de création de l’EPR de Flamanville et estime qu’un nouveau débat public est nécessaire avant sa mise en service.