Imaginons l’imaginable

Editorial de l’ACROnique du nucléaire n°95


L’industrie nucléaire est la seule industrie qui nécessite une autorité de sûreté pour elle toute seule et un institut d’expertise entièrement dédié. Cette spécificité est due au danger qu’elle représente. La catastrophe de Fukushima est venue rappeler cruellement ce fait. Elle est le résultat d’un échec de l’exploitant, mais aussi du contrôle.

Une telle catastrophe est-elle possible chez nous ? La question taraude tout le monde, même les promoteurs de cette industrie. Comme on ne peut plus accuser le système soviétique, le directeur de l’IRSN explique qu’il lui faut « imaginer l’inimaginable » pour garantir la sûreté. Pourtant, les causes de la catastrophe de Fukushima étaient non seulement imaginables, mais bien connues. Le mot « tsunami » est d’origine japonaise…

L’industrie nucléaire est plutôt adepte de la devise shadok : « S’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème ». C’est le cas en particulier pour les déchets. Maintenant, elle va devoir prendre en compte les questions et les problèmes qu’elle refusait d’imaginer : le canal plus haut de 15 mètres par rapport aux deux réacteurs de Fessenheim, un risque inimaginable ? L’oléoduc par dessus le canal d’amenée d’eau des 6 réacteurs de Gravelines, un risque inimaginable ?

Pour aider le directeur de l’IRSN, caution scientifique de ses mandants politiques, à penser l’« inimaginable », nous avons collecté un certain nombre d’interrogations terre à terre, qui sont soumises par écrit via un groupe de travail mis en place par les trois CLI du Nord-Cotentin. Elles forment le dossier principal de ce numéro de l’ACROnique du nucléaire.

Inlassablement, nous continuons à actionner la pompe à idées, car pour paraphraser les shadoks, « il vaut mieux pomper même s’il ne se passe rien que risquer qu’il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas. »

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